Extraits du rapport du Contre-amiral JEHENNE
 
I – Création du Corps des Canonniers Marins
 
Le 9 août 1914, le Ministre de la Marine propose au département de la Guerre de lui céder les disponibilités d’artillerie et le personnel correspondant pour renforcer les opérations de siège.
 
Le 15 août, cette proposition est acceptée.
 
La Marine offre 9 pièces de 14 et 9 pièces de 16.
 
Tandis que les pourparlers ont lieu, les Allemands s’avancent sur Paris, et la Guerre demande à la Marine d’envoyer immédiatement les pièces promises et le personnel prévu pour ces matériels afin de l’utiliser à la défense de Paris.
 
Le Capitaine de vaisseau AMET reçoit ainsi, à 4 ou 5 jours d’intervalle, 2000 marins environ qui sont, dès le 1er septembre, répartis dans les forts de Paris.
 
 
II – Les Canonniers Marins affectés à la défense du camp retranché de Paris
 
A peine arrivés au cantonnement de Livry, dans la soirée du 30 août 1914, les meilleurs éléments de la formation (environ 750 hommes) sont répartis en détachements qui vont prendre, le 1er septembre, le service des pièces à longue portée (120-L et 155) dans les forts de Vaujours, Stains, Ecouen et redoute du Moulin Domont, Montlignon, Cormeilles-en-Parisis.
 
Le 2 septembre, 150 hommes environ sont envoyés dans les forts de Sucy, Rosny, Hautes Bruyères, Butte Pinson, Stains et Mont-Valérien pour y armer les pièces de 75 contre aéronefs, en remplacement des artilleurs partis la veille pour armer des batteries de 75.
 
Le 3 septembre, 300 hommes environ sont répartis dans certains forts pour y assurer le service des pièces de flanquement et de caponnières.
 
Le 5 septembre, un nouveau contingent de 250 hommes venant de Brest et de Lorient est presque entièrement partagé entre les forts de Villeneuve-Saint-Georges et de Montlignon.
 
Après la formation des premiers détachements des forts, il reste au cantonnement de Livry un nombre assez considérable (environ 500 hommes) de marins qui sont groupés en compagnies et entraînés rapidement en vue de leur utilisation éventuelle. Cette réserve fournit, dans le courant de septembre, les compléments nécessaires à l’armement des forts ou des batteries installées dans le camp retranché de Paris au début d’octobre.
 
Finalement, à la fin de septembre, l’ensemble du régiment des canonniers marins est sensiblement divisé de la façon suivante :
-         1500 hommes dans les 7 forts principaux des régions nord et est du camp retranché de Paris ;
-         300 hommes environ pour les deux batteries de 16 de Coubron et Saint-Brice ;
-         200 hommes environ dans les sections de 75 contre aéronefs de 5 forts.
 
Pièces de 16 affectés à la défense de Paris.
 
4 pièces demandées par le général GALLIENI pour la défense du camp retranché de Paris et constituées en batteries de 2 pièces arrivent le 3 octobre au moment où la plus grande partie du régiment des canonniers marins va quitter les forts de Paris pour se rendre à Toul et à Verdun.
 
Ces deux batteries sont installées l’une à Coubron, l’autre à Saint-Brice. Chacune des batteries de Coubron et de Saint-Brice comporte un effectif de 70 hommes.
 
L’ensemble des travaux (terrassements, abris à munitions, baraquements, lignes téléphoniques, etc.) est terminé dans les deux batteries le 20 novembre, sauf les deux observatoires de la batterie Saint-Brice qui ne sont prêts que le 15 décembre 1914.
 
Le recul de l’ennemi rendant de plus en plus improbable une attaque sur Paris, le gouvernement militaire envisage bientôt l’envoi aux Armées des ressources dont Paris n’a plus besoin. Dans cet ordre d’idées, les munitions des batteries de Coubron et Saint-Brice sont dirigées sur Toul le 25 décembre 1914, et le personnel marin restant dans le camp retranché de Paris est, en janvier 1915, fractionné en deux groupes dont la composition d’inspire du départ prochain de ces groupes pour l’est et de leur affectation envisagée dans les armées. L’un de ces groupes est constitué par certains services auxiliaires et, avec le personnel de défense contre aéronefs, il quitte le camp retranché le 7 mars pour aller dans l’est. L’autre groupe, constitué par les armements des pièces de Coubron et Saint-Brice, est coupé en deux groupes équivalents et symétriques permettant leur scission entre Verdun et Toul.
 
Le 3 mars 1915, après avoir été remplacés par des artilleurs, les armements de Coubron (118 hommes) et de Saint-Brice (112 hommes) sont respectivement dirigés sur Toul et Verdun ; il ne reste plus dans chaque batterie que 10 hommes et un gradé pour la mise en ordre du matériel d’armement au service de l’artillerie des secteurs correspondant aux batteries.
 
Quant aux pièces de 16, les 2 canons de Coubron sont expédiées à Toul (en avril 1915), le canon de Saint-Brice est envoyé à Dunkerque (en mai 1915) et l’autre est mis en réserve d’où il part à son tour en juin 1915 pour la même destination.
 
 
III – Modifications successives de l’organisation du Corps des Canonniers-marins détachés aux Armées.
 
En octobre 1914, le 1er régiment de canonniers marins est constitué par :
-         neuf batteries organiques ;
-         un parc (Toul et Verdun) ;
-         des services administratifs (Toul, Verdun et Paris).
 
Les batteries sont réparties en quatre groupes :
-         le 1er groupe à Verdun sous les ordres du Capitaine de frégate GRANDCLEMENT ;
-         le 2ème groupe à Toul sous les ordres du Capitaine de frégate GILLY et où réside également le Capitaine de vaisseau AMET ;
-         le 3ème groupe à Nancy sous les ordres du Capitaine de frégate ECKENFELDER ;
-         le 4ème groupe à Paris sous les ordres du Lieutenant de vaisseau RENAUX.
 
Le 1er groupe reste assemblé autour de Verdun jusqu’au mois de mars 1916.
 
Les batteries des deuxième et troisième groupes sont assez rapidement éparpillées sur le front de Lorraine ; deux d’entre elles (3ème et 5ème) arment les trains de 19 A.L.V.F. (artillerie lourde voies ferrées).
 
Le 4ème groupe est supprimé en 1915 et ses batteries sont réparties entre les autres groupes ; l’une d’elles (la 9ème) sert à constituer une batterie d’A.L.V.F. de 27 sous les ordres du Lieutenant de vaisseau HERITIER.
 
En mars 1915, le régiment prend le nom de « Batterie de canonniers-marins ».
 
En février 1916, les canonniers marins sont, par ordre du général en chef, rattachés à l’artillerie lourde à grande puissance (A.L.G.P.).
 
Le Capitaine de vaisseau JEHENNE, commandant les canonnières fluviales depuis le 11 novembre 1915, prend aussi à la date du 18 mars 1916 le commandement supérieur des batteries de canonniers marins, en remplacement du Contre-amiral AMET rappelé au Service Général de la Marine.
 
Au commencement du mois d’avril 1916, les parcs de Toul et de Verdun sont ramenés à Mailly ; les services administratifs sont concentrés à Paris sous les ordres du Capitaine de frégate ECKENFELDER ; le commandant supérieur et son Etat-major suivent les différents déplacements de son quartier-général.
 
Le Commandant supérieur est représenté dans chaque armée par un Lieutenant de vaisseau qui est adjoint au commandant de l’A.L.G.P. de l’Armée et exerce le commandement des unités de marins qui s’y trouvent.
 
Dès le commencement d’avril 1916, le Capitaine de vaisseau JEHENNE envisage et poursuit la création des batteries mobiles de 16 en remplacement des matériels à poste fixe utilisés jusqu’alors.
 
Ces batteries mobiles sont destinées à remplacer progressivement les anciennes batteries organiques, à l’exception des 3ème et 5ème batteries qui restent affectées aux trains A.L.V.F.
 
Elles commencent à sortir en fin 1916 malgré de grosses difficultés.
 
En janvier 1917, l’A.L.G.P. est englobée dans la réserve générale d’artillerie lourde commandée par le Général de division BUAT.
 
Les unités de marins (batteries et canonnières) forment la 3ème division R.G.A.L. sous les ordres du Capitaine de vaisseau JEHENNE (nommé Contre-amiral le 23 février 1917).
 
Mais, les 3ème et 5ème batteries de marins armant les trains d’A.L.V.F. restent attachées à la 1ère division R.G.A.L. Elles sont d’abord commandées par des chefs d’escadron d’artillerie, mais le 1er août 1917, le Capitaine de corvette STAPFER prend le commandement du groupe de 305 et, le 14 janvier 1918, le Lieutenant de vaisseau KERDUDO est nommé au commandement du groupe de 19 ; l’expérience prouve qu’ils ne sont pas inférieurs à cette tâche.
 
Toutefois, les deux groupes créés sont incorporés dans les régiments d’artillerie de terre.
 
Pendant l’année 1917, onze batteries mobiles sont créées ainsi qu’une batterie de péniches portant chacune un canon de 19 modèle 70-93 et une batterie comprenant une péniche armée d’un canon de 24.
 
Au début de 1918, les canons de 14 modèle 1910 sont rendus à la Marine, les anciennes batteries organiques encore existantes sont définitivement supprimées et les batteries mobiles de 16, dont le nombre est porté à 18, sont réparties entre quatre groupes organiques :
-         groupe comprenant 4 batteries au Groupe d’Armées de l’Est, sous le commandement du Capitaine de corvette d’EUDEVILLE ;
-         groupe comprenant 4 batteries au Groupe d’Armées du Centre, sous le commandement du Lieutenant de vaisseau de FOURCAULD, puis du Capitaine de corvette CHOLET ;
-         les 3ème et 4ème groupes comprenant chacun 5 batteries, commandés, le 3ème par le Lieutenant de vaisseau de VIGOUROUX d’ARVIEU, le 4ème par le Capitaine de corvette DARLAN, sont affectés à la réserve du G.Q.G.
 
Un cinquième groupe commandé par le Lieutenant de vaisseau QUESNEL et comprenant les péniches-canons est également affecté à la réserve G.Q.G.
 
Le Capitaine de corvette STAPFER est détaché comme représentant de la R.G.A. à la 7ème Armée ; le Lieutenant de vaisseau de FOURCAULD occupe un poste analogue auprès du Groupe d’Armée du Centre.
 
En mars 1918, la R.G.A.L. devient la R.G.A. (réserve générale d’Artillerie) et passe sous les ordres du Général HERR, inspecteur général de l’Artillerie. Le Contre-amiral JEHENNE, tout en conservant le commandement de la 3ème division R.G.A., prend le commandement supérieur de toutes les formations de marins détachés aux Armées (fusiliers et canonniers marins, auxquels vient s’ajouter, en novembre 1918, la Flottille de Surveillance créée sur le Rhin).
 
En fin décembre 1918, la Marine ayant signalé ses besoins en personnel, il est procédé au désarmement des trains d’A.L.V.F. armés par les marins et à celui de six batteries mobiles de 16 dont le nombre se trouve ainsi réduit à douze batteries.
 
Le 28 janvier 1919, le Ministre de la Marine demande au Maréchal de France commandant en chef les armées françaises d’envisager le désarmement et le retour à la Marine du personnel et du matériel des canonniers marins. Ce désir reçoit satisfaction, le mouvement prévu des douze batteries vers les bords du Rhin est arrêté et la formation est virtuellement dissoute le 1er mars 1919.
 
 
IV- Les opérations de l’année 1916.
 
Un certain nombre de pièces fixes installées en 1915 restent en batterie en Champagne, en Lorraine et en Alsace. De nouvelles pièces sont successivement mises en batteries dans les mêmes secteurs au cours de l’année 1916. Toutes sont très peu utilisées et font surtout des tirs de représailles et de la contrebatterie sur les pièces de gros calibre ennemies.
 
La plus grande partie de la formation participe aux deux opérations importantes de l’année : la défense de Verdun et l’offensive de dégagement entreprise dans la Somme.
 
Le 1er groupe (Capitaine de vaisseau GRANDCLEMENT, puis Lieutenant de vaisseau Le CLERC) et ensuite la 1ère batterie (Lieutenant de vaisseau d’ARVIEU), renforcée d’éléments de la 8ème batterie, sont restés à Verdun.
 
La 4ème batterie (Lieutenant de vaisseau RENARD), renforcée d’éléments de la 8ème batterie et de détachements prélevés dans les autres batteries organiques, est engagée dans la Somme.
 
D’autre part, les 6ème et 7ème batteries (Lieutenants de vaisseau OLLIVE, BARCKHAUSEN, puis de FOURCAULD) sont réparties sur le front de Lorraine et d’Alsace :
            Un 14 à Saint-Julien (Lieutenant de vaisseau LALOY) – un 16 à La Hazelle, transporté ensuite au bois le Fays (Enseigne de vaisseau ROCQ) – un 16 à Maidières (Lieutenant de vaisseau RETOURNARD) – un 16 au mont Saint-Jean (Lieutenant de vaisseau REILLE) – un 16 à     Champenoux (Lieutenant de vaisseau QUESNEL) – un 16 à Bathelémont (Lieutenant de vaisseau CHOLET) – un 16 à Pettonville (Ingénieur des constructions navales GUILLON) – un 16 à Carspach (Lieutenant de vaisseau LAIGNIER).
 
En outre, la 2ème batterie (Lieutenant de vaisseau STAPFER) est répartie sur le front de Sainte-Menehould à Reims :
            Un 16 à Virginy (Enseigne de vaisseau de MORAS) – un 16 à Wargemoulin (Lieutenant de vaisseau DESFORGES) – un 16 à Baconnes, puis à Bellevue (Enseigne de vaisseau DUPRE).
 
Enfin, la 8ème batterie (Lieutenant de vaisseau DARLAN) tient le front de Reims à Soissons :
            Un 14 à Reims (Lieutenant de vaisseau de VOGÜE) – un 16 à Guyencourt (Lieutenant de vaisseau GAUTIER) – un 16 à Brenelle (Enseigne de vaisseau de GEOFFROY).
 
 
Défense de Verdun
 
Les opérations de Verdun peuvent se diviser, en ce qui concerne les pièces de marins, en deux périodes nettement distinctes :
a)      du 21 au 29 février, les pièces de marine en position autour de la Place participent à la défense de la première heure et sont presque toutes prises par l’ennemi. Les détachements rivalisent d’ardeur et de courage et ne se replient que sur ordre ou à la dernière extrémité.
b)      Après une période transitoire de regroupement, de nouvelles pièces sont mises en batterie et participent à toutes les opérations de défense et de dégagement de la Place. La part active qu’elles prennent à ces opérations leur vaut souvent des félicitations du commandement (4 citations de détachements à l’Ordre de la 2ème Armée).
 
1ère période :

.../...
 
 Signé : AMET
 
 
2ème période

.../... 
 
Bataille de la Somme

.../...
 Signé : JEHENNE
 
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